La guérisseuse crut être éblouie par un soleil couchant, ce qui était impossible car elle était aveugle. Pourtant, c'était bien la face ronde couleur sang d'un soleil qu'elle voyait. Quelque chose frôla avec douceur ses fines moustaches. Elle "ouvrit" les yeux et ne vit que le noir : elle était de nouveau aveugle ! Pourtant dans son rêve elle était certaine d'avoir réellement vu ! Puis elle se persuada que ce n'était que son envie de retrouver la vue qui lui avait donner la vision. Complétement persuadée, elle se leva, se lécha le poitrail, et, ne pouvant contempla avec les yeux sa tanière huma l'air : elle sentit à peine le lointain parfum de ses plantes médicinales.

Apparemment je n'ai presque plus rien ! Il faut que je refasse des réserves !

Rosier Sauvage sortit donc de sa tanière, posa doucement sa patte sur le sol de peur de trébucher, puis, guidée par son odorat et aillant retenue à peu près le chemin pour sortir du camp, même privée de vue, elle sortit. Comme à chaque fois qu'elle sortait chercher des plantes, la guérisseuse huma l'air attentive au moindre bruit suspect. Une fois convaincue qu'il n'y avait pas le moindre danger, elle avança vers la plage. Le sable crissa sous ses pattes. Elle tâtonna le sol et s'écorcha la patte contre quelque chose de raide : un rocher ! Avec précaution elle monta dessus et fit sa toilette. Après quelque réflexions, elle décida de partir près de la rivière à deux faces, elle devrait trouver quelques plantes aquatiques !

Dès qu'elle sentit l'eau glacé inonder ses coussinets, elle sut qu'elle était arrivée. Elle tendit l'oreille pour savoir ou était l'eau de façon ne pas tomber et se noyer sûrement. Puis elle essaya de sentir le parfum des plantes qu'elle recherchait. Tout à coup un bruit la fit sursauter, elle trébucha et tomba dans l'eau. Au dernier moment et trop tard hélas, elle sentit le fumet d'un lapin : la bête devait être juste derrière elle.

La pauvre guérisseuse se débattit furieusement contre le courant qui l'emportait. Paniquée, elle essaya de trouver un appui à l'aveuglette. Mais ses griffes dérapèrent sur la pierre contre laquelle elle essayait de s'accrocher. Elle fixa le ciel sans le voir en songeant que sa dernière heure était venue. La chatte gris-perle fit une prière vers le clan des Étoiles avant de couler. Mais tout à coup quelque chose l'attrapa par la peau du cou. Jusque là inconsciente, Rosier Sauvage se réveilla et se débattit par instinct. Mais elle se rendit vite compte qu'elle était entraînée sur le rivage. On la posa au sol. La guérisseuse aveugle cracha l'eau puis se lécha la fourrure pour se réchauffer après son bain forcé dans la rivière glacée. Puis sans le voir elle miaula au chat avec chaleur, de façon à le remercier :

Qui êtes vous ? Merci de m'avoir sauvée en tout cas !

[ ... ]

Avec appréhension, je m'étendis sur ma couchette. L'air froid me frittait le nez au point que j'en pleurerai. Le vent me siffla aux oreilles, plus violent que jamais. Je m'emmitoufla vainement dans ma maigre couverture. Le clair de lune transperçait les arbres. Cette nuit blanche sembla éternelle et un instant, je crut que l'aube n'arriverait jamais. Mais quelques heures plus tard, la pâle lueur du soleil levant se manifesta. Les paupières lourdes, je fut aveuglée par cette clarté. Enfin, je me leva et bailla lourdement. Je chercha de petites denrées dans mon sac pour ravitailler mon ventre qui protestait de gargouillement.

[...]

[... ]

Il s'arrêta subitement. A deux pas devant lui, avait surgit la tête en triangle d'un serpent.

Le sang du jeune garçon se glaça dans ses veines. Le serpent se déroula : il devait faire au moins une dizaines de mètres. L'adolescent tenta de reculer et de s'enfuir en douceur mais l'animal rampait déjà vers lui.

Il appela à l'aide en oubliant qu'il était seul, bien sûr personne ne vint. Il regretta d'avoir accepté cette mission complétement insensée ! Son goût de l'aventure l'avait perdu !!!

C'en était fini. Le reptile le mordrait et il succomberait. Mais soudain le serpent s'arrêta. Jean tendit l'oreille et entendit des pas qui se rapprochaient. Des bruits de pas très forts. Trop forts pour qu'un homme seul puisse faire autant de bruit !

[... ]